Ma vieille voisine favorite a hérité d'un de ses arrière-petit-fils (ou arrière-arrière-petit-fils*, je ne sais plus) cette semaine. Elle vient prendre un café chez moi pour me présenter le marmot, quatre ans, bouclé, blond et gras comme un rose angelot. Il veut du jus d'orange, mais comme ce n'est pas le même que celui de maman, il change d'avis, demande du Coca, puis de la grenadine, puis un reste de gâteau qu'il voit dans le réfrigérateur. Ma voisine se plaint de n'avoir pas une minute de tranquillité avec ce petit diable bavard incapable de s'occuper seul. Je suggère au jeune Anatole d'aller escalader un arbre ou deux, ou de chercher des mûres dans la haie. L'angelot veut une paille et entreprend l'ascension du buffet en traînant un petit banc, puis une chaise. J'entends s'ouvrir les tiroirs. "Touche pas aux portes du buffet", crie la vieille, "ya un loup dedans". "Les loups vivent très loin dans les montagnes où il fait froid", rétorque le mouflet à qui on ne la fait pas. Il ajoute: quand je serai grand, je serai chasseur de loups le dimanche et bûcheron pendant les vacances. Pan, pan, mort le loup, blam, blam, tombé le grand arbre!
Une fois l'aïeule et l'enfant partis, je vais cueillir quelques poires, je débarrasse la table et m'aperçois que mon grand couteau à pain a disparu. Quand j'arrive chez ma voisine, je la trouve dans sa cuisine en train d'éplucher des carottes. Je lui explique en deux mots le motif de ma visite, et nous montons dans la chambre de l'enfant qui, dès qu'il me voit, rabat la couverture sur son lit. Nous soulevons la couverture, le grand couteau à pain est bien là, au milieu du lit, la pointe sur l'oreiller. Son manche est emmailloté dans un foulard noué par un lacet, et il semble reposer comme une poupée qu'on aurait soigneusement couchée et bordée. Après un interrogatoire subtil mais néanmoins serré, Anatole finit par avouer son méfait: il a volé la scie. Nous rectifions: c'est un couteau, pas une scie. Anatole nous explique que non, c'est une jeune scie. Elle a besoin de sommeil, de beaucoup de sommeil pour devenir une grande et belle scie. Après quelques nuits au chaud dans le lit, ses dents auraient commencé à pousser.
Une fois l'aïeule et l'enfant partis, je vais cueillir quelques poires, je débarrasse la table et m'aperçois que mon grand couteau à pain a disparu. Quand j'arrive chez ma voisine, je la trouve dans sa cuisine en train d'éplucher des carottes. Je lui explique en deux mots le motif de ma visite, et nous montons dans la chambre de l'enfant qui, dès qu'il me voit, rabat la couverture sur son lit. Nous soulevons la couverture, le grand couteau à pain est bien là, au milieu du lit, la pointe sur l'oreiller. Son manche est emmailloté dans un foulard noué par un lacet, et il semble reposer comme une poupée qu'on aurait soigneusement couchée et bordée. Après un interrogatoire subtil mais néanmoins serré, Anatole finit par avouer son méfait: il a volé la scie. Nous rectifions: c'est un couteau, pas une scie. Anatole nous explique que non, c'est une jeune scie. Elle a besoin de sommeil, de beaucoup de sommeil pour devenir une grande et belle scie. Après quelques nuits au chaud dans le lit, ses dents auraient commencé à pousser.
*des arrière-petit-fils: alors là, je ne suis pas certaine de l'orthographe.