Comment savoir si certaines positions (et les discours qui vont avec) sont de droite ou de gauche ? Peut-on être d'accord avec des politiciens qu'on voudrait ne pas soutenir ?
J'entends le discours de Marine Le Pen à propos de l'école, lors de la clôture de l'université d'été du FN et j'approuve ce qu'elle énonce. Alors que les dernières élucubrations de Peillon, de la FCPE, de Geneviève Fioraso, me font gémir.
Pourquoi Bayrou a-t-il cartonné auprès des enseignants de gauche aux avant-dernières présidentielles, et pourquoi, en quoi les sirènes du FN seront-elles efficaces aux prochaines ?
J'ai la triste impression que la gauche a abandonné l'école, qu'elle fait semblant de s'y intéresser, qu'elle cherche à gagner du temps et à ne pas faire de vagues. Quand on a supprimé le CAPES de lettres classiques, le FN a été le SEUL parti politique à en parler.
La gauche n'a plus les mêmes idées sur l'école. Les ambitions de gauche, les beaux rêves en partie réalisés (fut un temps où l'école élevait les enfants des classes populaires, les cultivait avec plus d'efficacité, intégrait les enfants immigrés mieux que maintenant) sont comme passés de mode, captés dans le miroir déformant et la moulinette de l'extrême droite* et donc on ne les reconnait plus qu'en tant qu'idées d'extrême droite. C'est un retournement que j'ai du mal à analyser et à comprendre. Est-ce que je suis une réac chevènementiste nostalgique d'une laïque idéalisée ? Une fausse degauche vraie dedroite ? Je suis loin d'être la seule, alors. Le discours de Marine Le Pen est, grosso modo, un discours de gauche qu'une énorme majorité d'enseignants soulagés applaudirait s'il émanait de leur ministre. On parle de confiscation, comme si des idées et des idéaux pouvaient être confisqués, mais à dire qu'on est d'accord avec un discours prononcé par le chef d'un parti d'extrême droite, on risque l'opprobre immédiat (voire la rélégation !) donc on hésite, on tergiverse, on met quinze "mais" ou "cependant" dans une phrase où il y a déjà un "nauséabond", un "populisme" et un "national-socialisme", jusqu' à la discussion prochaine.
Je n'arrive pas à comprendre comment quelqu'un qui a fait des études et qui enseigne l'histoire, les lettres, la philosophie, peut s'associer au FN sans en voir les grosses ficelles. Encore moins s'il en voit les grosses ficelles. Ce parti veut le pouvoir et adapte ses discours avec une habileté, une fausse simplicité et un très grand talent, en fonction de ceux à qui il s'adresse. On le tourne en ridicule, on l'abreuve de quolibets et d'insultes puériles, on lui répond mal, avec des arguments dérisoires. Le FN peut gagner des élections parce qu'il maitrise les moyens de communication, parce qu'il a de gros sabots quand les autres ont des pantoufles élimées, parce que les autres partis sont hébétés, sans intelligence de la situation, et qu'à l'image des blogs de gauche ils fonctionnent avec des réflexes plutôt qu'avec des arguments basés sur le pragmatisme et la réflexion honnête.
Et voilà pourquoi le FN monte, inexorablement.
***
Voilà un extrait du texte qu'on peut lire dans son intégralité sur le blog du collectif Racine (les enseignants avec Marine Le Pen)
L’urgence est donc de redresser l’École. [...]
Ce redressement suppose la redéfinition des contenus et pratiques d’enseignement, car l’Ecole doit avant tout instruire. Le primaire doit permettre à tous les enfants de maîtriser les savoirs fondamentaux : lire, écrire, compter. Ces apprentissages, par nécessité progressifs, exigent l’efficacité de méthodes éprouvées : c’est pourquoi la méthode syllabique doit prévaloir, l’exigence de compréhension ne saurait exclure l’exercice de la mémoire, et l’histoire, tout particulièrement celle de la France, doit être enseignée de façon chronologique. Il faut retirer des programmes de l’école élémentaire tous ces ajouts, fruits de la mode ou des obsessions d’un ministre.
Au collège comme au lycée, les cadres disciplinaires doivent être réaffirmés : un terme doit être mis aux pseudo-enseignements « transversaux » qui, sous prétexte d’interdisciplinarité, supplantent les apprentissages fondamentaux. Dans l’enseignement secondaire, le professeur doit enseigner la matière qu’il a étudiée, celle qu’il aime au point d’avoir choisi de la transmettre. Les langues vivantes, mais aussi anciennes doivent être revalorisées, de même que l’enseignement des sciences, les vocations scientifiques devant être ravivées.
Le redressement de l’Ecole exige par ailleurs que soient repensés la différenciation des filières et les paliers d’orientation. Il faut en finir avec le « collège unique » qui, sous prétexte de démocratisation, s’est traduit dans les faits par le triomphe de la médiocrité. L’orientation précoce, sous la condition d’une réhabilitation véritable des voies technologiques et professionnelles et de la mise en place de « passerelles » permettant, le cas échéant, des réorientations, doit devenir la norme : il en va de la réussite de chacun selon ses capacités. A cet égard, les filières d’apprentissage doivent tout particulièrement être revalorisées.
Mais le redressement de l’Ecole passe aussi par sa sanctuarisation et par la reconnaissance du mérite. La lutte contre la violence scolaire doit constituer un impératif absolu : elle exige que la culture laxiste de l’excuse et de la permissivité cesse d’avoir cours et laisse place à une culture de l’excellence et du dépassement de soi par l’effort. A ce titre, la formation des enseignants doit être profondément repensée : un professeur ne doit pas seulement « gérer des situations », il doit surtout incarner cet impératif d’excellence par les compétences et le savoir qui fondent la légitimité de sa fonction, cela justifiant le cours magistral et la « verticalité de la transmission ». De même importe-t-il que le mérite se trouve symboliquement reconnu : non seulement les notes doivent évidemment être maintenues, mais un système qui favorise l’émulation est souhaitable.
La cause nationale que représente le redressement de l’Ecole exige enfin que l’Etat soit pleinement rétabli dans sa souveraineté et qu’à lui seul revienne, au titre de l’intérêt supérieur de la Nation, de définir les finalités et les modalités d’une réforme en profondeur du système, dans le respect des spécificités de l’enseignement privé sous contrat ou hors contrat. Les orientations des politiques éducatives n’ont plus à être décidées par ces instances supranationales qui ont conduit, pour le pire, au désengagement croissant de l’Etat. Une recentralisation de l’administration de l’Education nationale s’impose au contraire, afin d’éviter la multiplication anarchique d’expériences diverses dont le résultat n’est jamais vraiment contrôlé : seul l’Etat peut redresser le système en garantissant la stricte observation de l’égalité et de l’équité républicaines.
à voir aussi : Marine Le Pen mise sur les professeurs pour les municipales
Je suis en Zep et les profs votent majoritairement FN
ainsi que L'école du Front National, mythologie et ultralibéralisme : [...]Marine Le Pen veut "revoir le statut de l’école, créer un nouveau type d’établissement public, doté de la personnalité juridique et d’une autonomie administrative et financière. On en parle depuis longtemps, mais rien ne bouge. Je le ferai. Soumis à l’autorité des acteurs institutionnels (Etat et collectivités territoriales), le directeur d’école souffre en outre d’un manque cruel de légitimité pour assurer les responsabilités qui sont les siennes. [...] Il doit avoir ce rôle de véritable «manager » chargé d’impulser le projet pédagogique de l’école en dialogue permanent avec l’ensemble des acteurs de la communauté éducative". [...]Donner à chaque école l’autonomie administrative et financière revient à casser tout cadrage national des programmes, à mettre toutes les écoles en concurrence directe, et à faire rentrer les logiques patronales au sein de l’école. Cela signifierait également la fin de l’école gratuite, chaque établissement devant trouver des moyens de s’autofinancer. Ce serait une catastrophe pour toutes les classes moyennes et populaires, en totale contradiction avec tous les principes de l’école républicaine. Moins grave mais plus étonnant, ce serait en contradiction totale avec toutes les autres propositions de Marine Le Pen : si chaque directeur d’école s’occupe de fixer les règles de son établissement, les enseignements, les programmes, tout ce qu’a dit Le Pen sur les règles, enseignements et programmes comme ciments de l’école républicaine avant est sans effet.
* Marine Le Pen ne veut plus entendre parler d'extrême droite pour elle et son parti. Elle a prévenu qu'elle emploierait la voie judiciaire contre ceux qui persévéreraient dans l'erreur. Elle propose et recommande "droite nationale" Diantre. Qui est dans l'extrême droite maintenant ?