mercredi 4 août 2010

Stigmatisons les plages



Dans le billet précédent, mes commentateurs et moi déplorions le peu de proximité de la police de proximité.
Andouilles que nous sommes, de nous plaindre en été que les gendarmes ne sont pas dans leurs gendarmeries...
Où sont-ils alors ? Ils sont sur les côtes. Ils sont sur les rochers pour maintenir l'ordre balnéaire. Je suis allée à la plage plusieurs fois depuis le début de l'été, en Bretagne, et je n'en ai pas vu. Soit les gendarmes se confondent bien avec l'environnement dans leur petit maillot de bain couleur de sable ou de goémons, soit il ne sont pas sur les plages bretonnes, sauf ceux qui, jumelles sur le nez, guettent les imprudents à l'ombre de leurs petites guérites de sauveteurs en mer.
J'ai lu cet article à propos de la plage des Catalans de Marseille, celle qu'il ne faut pas stigmatiser, grâce à un billet de Nicolas. J'ai pensé d'abord que l'idée même de stigmatiser une plage était nunuche. Il y a longue lurette que ce mot stigmatiser à toutes les sauces me fait ricaner méchamment, et je stigmatise sans hésitation ceux qui l'emploient, tant je devine la suite du discours qui va s'égréner avec autant d'originalité, d'improvisation et d'opinions personnelles que ces cartes perforées qu'on met sur le rouleau d'un orgue de barbarie.
C'est une histoire d'agression sexuelle entre mineurs. Deux garçons ont immobilisé une baigneuse, et lui ont fait des choses dont elle n'avait pas envie du tout." "Ca aurait pu se passer n'importe où, il ne faut pas stigmatiser la plage des Catalans", a réagi auprès de l'AFP Patrick Menucci, maire PS du 1er secteur de Marseille dont la plage des Catalans dépend." Nicolas cite aussi cet extrait du même article que je commente en ce moment, et que je n'avais pas lu en entier, m'arrêtant sur la bêtise de l'expression. Je pense à mes grandes plages bretonnes, aux moutonnements de dunes, aux bois de pins qui les prolongent. Chaque été, il y a au moins une fille qui se fait violer, un enfant qui se fait aborder par un gentil monsieur tout nu, un dormeur qui se fait voler son sac avec son Nikon dedans.
"Le maire de secteur a précisé que 19 médiateurs de l'Afpa (association nationale pour la formation professionnelle des adultes) qui terminent leur stage de sécurité-médiation, sillonnent depuis deux ans, sept jours sur sept de 12H à 20H, les zones de rochers non surveillées par la police.

"Le dispositif plage est énorme. Nous avons une réunion de travail tous les vendredis après-midi (..) avec la police nationale, la police municipale, les médiateurs de la mairie de secteur et de la mairie", a-t-il détaillé."

Quand je pense au tintouin que font certains pour s'opposer à la vidéo surveillance d'un hall d'immeuble où l'on désire chasser les dealers, je me demande pourquoi personne ne réagit pour critiquer cette extraordinaire présence policière: "des zones de rochers non surveillées par la police arpentées constamment par des médiateurs de la sécurité". On se croirait dans un pays en guerre, en pleine zone de conflit. Et il ne faut pas stigmatiser cette plage pleine de flics et médiateurs de la sécurité ! Médiateur de la sécurité, c'est le nouveau nom pour Vigile? Ah, ça donne envie d'aller se baigner, tiens! Il se rend compte de ce qu'il dit, ce maire PS ?
Soit cette armada de flics et vigiles pour protéger les baigneurs est inutile, et on peut se demander pourquoi ce maire de Marseille dilapide l'argent public et donne une piètre image de sa cité en laissant entendre qu'on entre là dans une zone dangereuse, soit l'hyperprésence policière est justifiée sur cette plage, qui mérite alors pleinement sa stigmatisation.

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Illustration: la pointe de Penvins avant-hier
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9 commentaires:

  1. Stieg Maatiesen est un écrivain suédois de la fin du vingtième siècle, auteur de polars chiants et politiquement corrects.
    Initialement l'expression "il ne faut pas stiegmaatieser" était utilisée de façon ironique pour railler une certaine doxa bien-pensante qu'on trouvait un peu partout : courrier des lecteurs de Télérama, éditoriaux des Inrocks, pages Rebonds de Libé.

    Malheureusement, du fait de l'inculture des correcteurs de presse, c'est l'orthographe stigmatiser qui s'est imposée.

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  2. À mon avis, tous ces gens sont rien que des gros racistes, j'vois pas d'autre explication.

    Malavita : excellent !

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  3. Je rentre de Belgique après trois jours.

    Gare du Nord : des militaires en arme.

    Trois avaient suffi à me faire oublier.

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  4. Nicolas, vous n'avez rien compris : c'était une Gay Pride tendance SM...

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  5. Malavita: génial !C'est lui qui a écrit Mille hyènes et un homme, je parie!

    Nicolas: z'êtes sûr que ce n'était pas un camp de scouts d'Europe ?

    Didier, forcément! Il y a un projet de partenariat entre Marseille et la Normandie pour envoyer par cars quelques centaines d'adolescents chahuteurs sur vos belles plages au climat si vivifiant, avec leur encadrement judiciaro éducatif, bien entendu.

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  6. J'ai pas tout compris :
    les stigmates du christ lui ont été infligés par un écrivain suédois ?
    probablement celui qui a écrit ensuite l"évangile selon Maatieusen ?
    ben, on en apprend des choses sur ce blog !...je regrette pas d'être venue ...

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  7. dimanche soir, j'ai vu sur F2 un excellent téléfilm (avec TT dans Télérama !!! précision utile pour Malavita) : "L'amour, c'est la honte". Ca ne se passe pas à Marseille, ça ne se passe pas dans une cité, ni dans une cave d'immeuble pourri, non, seulement dans une zone pavillonnaire, avec piscine dans le jardin, des jeunes plutôt propres sur eux, certains un peu moins propres (un peu plus "basanés", mais à peine), ils dealent du shit, pour se faire de l'argent de poche, ils ont un langage très cru (autant les filles que les gars), influencé par les films pornos, ils en rajoutent dans la surenchère provo. Sauf que dans cette histoire ce sont toujours les mêmes qui payent : les nanas ! La misogynie se porte très bien en 2010, car la fille qui se veut l'égale de l'homme sera désignée comme la "pute", la "salope", violée sous le regard lâche et complaisant de son petit ami... et des autres copains... (dont l'un se fera un devoir de la plaquer au sol, pendant que le caïd se la tapera, elle qui, ils ne le verront qu'après, était vierge).

    Nous stigmatisons les mecs ?.. si ça ne tenait qu'à moi... mais je sais que la société tout entière est complice (hommes/femmes) de cette injustice-là (dont les femmes sont les victimes).

    Alors, choisissons nos causes, et les valeurs que nous voulons défendre. Les miennes sont de dénoncer cette domination-là, ces abus-là... ceux que subissent les femmes, les jeunes-filles, en 2010 encore. Je revoyais "La journée de la jupe" film porté avec grandeur par la grande Isabelle Adjani :

    "Je veux que le gouvernement décrète "une journée de la jupe" pour déclarer qu'on peut porter une jupe sans être une pute !!!"

    Le grand perdant dans tout ça ? l'amour... mais ça c'est pas nouveau.

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  8. Les gendarmes ont vu leur effectifs se réduire comme une peau de chagrin. D'après les conversations que j'ai eu avec un de mes amis-gendarme lui-même- depuis plus de 6 ans, les brigades sont en sous-effectif, avec des territoires de plus en plus grands et des tâches surmultipliées. Il est courant qu'un OPJ se rende seul sur un accident ... cela ne vous fera pas changer d'avis, je sais, mais comme vous, je crains ces sortes de milices municipales et autres.

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  9. Lucia Mel: c'est banal. Quand s'exprime la loi du plus fort, il y a toujours un surplus de violence pour les femmes et les enfants; dans les situations de grande pauvreté aussi, mais là il faut arrêter les violons, ce n'est pas le cas.

    La Pecnaude: des flics et gendarmes et surveillants, il y en a baucoup sur cette plage, au contraire, si on en croit ceux qui parlent de l'"incident".

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Modération parfois, hélas, mais toujours provisoire, ouf.